Planté, Alban (1882-1919)

Né à Valence-sur-Baïse (Gers), le 16 avril 1882. Études au séminaire d’Auch. Curé de Margouet-Meymes. Nommé à Cassaigne le 18 avril 1914, il ne peut occuper son poste que pendant quelques mois car il est mobilisé et affecté à la 17e section d’infirmiers militaires de la 67e division de réserve (celle du docteur Voivenel, voir ce nom).
Henri Faget a retrouvé dans sa famille et autour les lettres envoyées à ses paroissiens notables par le curé devenu soldat (« déguisé en soldat », comme il le dit lui-même dans sa lettre du 28 août 1914, lettre qui demande aussi des nouvelles de « Monsieur Maurice », Maurice Faget, fils de ses correspondants principaux, et père d’Henri). Voir la notice Faget Maurice. Les lettres sont réunies dans un petit livre à compte d’auteur d’Henri Faget, publié sous le titre Alban Planté, Lettres d’un prêtre-soldat à ses paroissiens, avril 1914-décembre 1916, chez l’auteur (henri.faget459@orange.fr), 2014, 102 p.
Dans ses lettres, le curé emploie un ton de respectueuse et amicale plaisanterie. Il se préoccupe de la décoration de sa chère église ; il lance quelques piques à certains confrères à propos du denier du culte. Il demande l’envoi de son calice pour pouvoir dire la messe, mais il doit y renoncer car le paquet risquerait de s’égarer. De Cassaigne, ces dames lui envoient une étrenne qu’il utilise pour venir en aide à une famille éprouvée (p. 46 et 50). Lors des grandes fêtes chrétiennes, il adresse des lettres pastorales à ses paroissiens pour les réconforter.
Au début de la guerre, il passe quelque temps à Toulouse (p. 10), mais il arrive à Suippes en Champagne le 16 août, il gagne l’Argonne, puis se replie vers Verdun avant que la victoire de la Marne ne rétablisse la situation (p. 88). Il écrit : « Les services de la voirie n’ont plus de secrets pour moi, puisque j’ai passé un peu par tous : j’ai raclé la boue, cassé des cailloux, curé des fossés, enlevé des fumiers, déchargé du sable et du ciment, charrié du gravier avec la brouette pour la reconstruction d’un pont. […] Enfin, le 8 décembre, j’étais à ma grande joie affecté comme infirmier-major à la salle des fiévreux dans notre ambulance de Sommedieue. » Il lui arrive de dormir dans un grenier infesté de souris et de rats (p. 30-31), mais il est souvent accueilli dans des couvents (p. 20 et 38) car « les bonnes sœurs n’ont pas voulu que je couche dans le foin ».
Les lettres contiennent une fois l’expression « maudite guerre » (13 novembre 1914, p. 30), et reconnaissent l’existence du « cafard » qui est l’équivalent du spleen ou de l’ennui (p. 35). Mais il ne cesse de dire que la santé morale de l’armée est bonne (30 octobre 1914), que les soldats sont étonnants d’enthousiasme (17 janvier 1915), alors que les Allemands connaissent la faim (d’après la lettre d’un prisonnier qui aurait écrit : « assi lou pan coummenço à manca »). D’un autre côté, c’est Dieu qui dirige les opérations : « les fautes de la France pèsent bien lourd dans un plateau de la balance de Dieu », mais cela peut être compensé par les pleurs, les prières, les sacrifices (p. 25). Dans tous les cas, le Christ aime les Francs (p. 43) et Dieu ne voudra pas imposer à la France des épreuves trop dures (p. 47). Quant à la religion, « elle nous réconforte en ce sens qu’elle nous apprend à accepter la souffrance de la main de Dieu (p. 49).
La lettre pastorale pour être lue le 25 décembre 1915 (p. 75-80) revient sur « le courage incontestable de nos valeureux soldats et le génie incontesté des chefs qui les commandent ». Elle expose les raisons de ne pas faire la paix « dans l’état actuel des choses » et elle souhaite « que notre Patrie sorte de l’épreuve actuelle grandie moralement aux yeux du monde entier ».
La lettre du 5 avril 1916 est envoyée de Dax où le curé Planté est soigné par les Pères Lazaristes. Son état de santé s’est dégradé à un tel point qu’il a été évacué. De là, il s’insurge contre la « rumeur infâme » exposée par un journal de Toulouse (La Dépêche, dont il ne cite pas le titre) qui prétend que les prêtres ne font pas leur devoir militaire de Français. « Tous les prêtres-soldats de France ont magnifiquement rempli jusqu’au bout le rôle qui leur a été départi au début de la campagne. » Que les journalistes qui font la guerre à Toulouse viennent passer quelque temps dans les tranchées !
La dernière lettre retrouvée, de décembre 1916, envoyée aux paroissiens, évoque son départ pour l’armée d’Orient. Il en profite pour faire l’histoire des premières années du siècle, ouvertes par l’Exposition universelle et les affirmations de « Science, Civilisation, Progrès ». Mais « la principale préoccupation était le plaisir ». Puis on a voulu chasser les congrégations et imposer la loi de Séparation « pour étrangler l’Église de France ». C’est le danger de la Patrie et la guerre qui ont fait retrouver l’union.
Henri Faget nous informe qu’aucune autre lettre n’a été retrouvée. Revenu à son presbytère de Cassaigne, Alban Planté y est mort le 5 avril 1919.
Rémy Cazals, avril 2016

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