Guillot, Gaston (1889-1960)

Résumé de l’ouvrage :

La nuit Casquée, Spès, 1931, 227 p.

Douze années après la guerre, des poilus d’un régiment non dénommé, possiblement le 1er BCP, en garnison avant l’été 1913 à la caserne Beurnonville de Troyes (Aube), puis à Senones (Vosges), survivants de la Grande Guerre, se retrouvent dans une taverne de Montmartre avec leurs épouses. Chacun d’entre eux se rappelle tour à tour les vivants et les morts dans des petits récits anecdotiques truculents ou tragi-comiques, certains trouvant leur siège dans l’Aube, ou pour la plupart en Lorraine, en Meurthe-et-Moselle ou dans les Vosges, à divers moments de la Grande Guerre.

Eléments biographiques sur l’auteur

Gaston Guillot est un né à Paris le 27 novembre 1889. Il indique en exergue-hommage de son livre avoir un frère de 22 ans « qui laissas dans une ambulance allemande ton pauvre corps ». Il parle d’Aimable Guillot, 2e classe au 156e RI, né 6 janvier 1893 à Paris, tué à l’ennemi à Morhange le 20 août 1914. Il évoque également un frère aîné, Georges, mort à 37 ans d’un éclat d’obus à la poitrine au Fort de La Pompelle (Marne). Mais une incertitude demeure ; s’agit-il en fait de ce soldat du 30e RI né le 12 décembre 1879 à Paris, mort de ses blessures à l’ambulance 1/44 de Dugny dans la Meuse ? Journaliste, traducteur et romancier, il publie une quarantaine d’œuvres de fiction entre 1906 et 1957. Ancien combattant dont la carrière militaire n’est toutefois pas connue, Gaston Guillot est signalé membre du Service Médical du Bureau de l’Association des Ecrivains Combattants pour l’exercice 1933. Gaston Guillot meurt à Paris le 8 janvier 1860.


Commentaires sur l’ouvrage :

Cet ouvrage, à classer dans l’imposante cohorte des contes de guerre, modèles des récits rocambolesque et invraisemblables nés de 1914-1918. Suite d’anecdotes, pour certaines basées sur un fond de vérité (les quelques patronymes ou toponymes cités existent), les situations exposées sont toutefois improbables et, à l’étude, comportent des erreurs parfois grotesques qui font douter que l’auteur fut lui-même un combattant. Par exemple, il voit une Bourguignotte aux combats de Bru (Vosges) début septembre 1914 (p. 67), situe La Chapelote (sic) à 20 km du premier village (p. 83), évoque un no man’s land de 10 km en octobre 1914 dans les Vosges (p. 120) ou attribut à Blâmont le statut de hameau (p. 127). Il fait également des erreurs terminologiques qui dénotent l’absence de maitrise du vocabulaire combattant ; il fixe une bougie au bocquillon (sic) d’une baïonnette (p. 193) ou trouve la lame de la Rosalie triangulaire ! (page 200). Cette suite carnavalesque, livre-cliché inutile de récits de guerre, ne saurait en aucune façon constituer un témoignage et est à ranger dans les curiosités locales ; nombre de récits siégeant leur « développement » dans les secteurs de Baccarat, La Chipotte, La Chapelotte ou Senones, dans les Vosges.

Yann Prouillet,18 avril 2025

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Pannetier, Stéphane-Amédée (pseudonyme André Gervais) (1891-1962)

Résumé de l’ouvrage :

Tu te souviens. Contes de guerre. André Gervais (de son vrai nom Stéphane-Amédée Pannetier), Durassié et Cie, 1958, 253 p.

Après une préface de Maurice Genevoix qui dit, en 1958 : « Nous sommes, tous autant que nous sommes, des survivants anachroniques. (…) C’est notre survie, en somme, qui a été un accident » (page 7), André Gervais, qui fut du 105e RI, livre 17 contes de guerre qui mettent en scènes personnages truculents et cocasses, poilus de carte postale. On lit ainsi :
– un poilu cuisinier qui confond le sel et le sulfate de soude
– un poilu qui cocufie un adjudant
– une scène biblique à Noël 1915
– une autre glorieuse lors d’une action de Stosstruppen sur La Somme (septembre 1916)
– une patrouille angoissante… dans ses propres lignes !
– une vache qui reçoit en cadeau une jambe de bois
– un « embusqué » mort en héros
– un rat cuisiné en rôti
– une rencontre avec le père Brottier
– Clemenceau élevé au rang de saint
– un capitaine héros de légende
– le souvenir « ferroviaire » d’un général Cambronne
– un chien de front recueilli
– l’aspirant Pierrot tué
– l’adjudant Macheboeuf, artisan de tranchée dégradé pour avoir bu le vin de toute une compagnie
– un coup de main victorieux (septembre 1917) avec un aspirant désobéissant
– un couteau de tranchée chargé de souvenirs

Commentaires sur l’ouvrage :

André Gervais, de son vrai nom Stéphane-Amédée Pannetier, est un touche-à-tout, illusionniste, romancier, journaliste, dessinateur, peintre et sculpteur, spécialiste de la Légion, né le 10 août 1891 à Commentry (Allier) et décédé dans cette même commune le 30 avril 1962. Mobilisé le 9 août 1914, il est lieutenant au 105e RI. Blessé pendant la Grande Guerre, il devient journaliste et, traumatisé par le conflit, milite pour la paix. Mobilisé en 1939 avec le grade de capitaine, il est fait prisonnier en 1940. Fervent pétainiste, apologiste de la Légion française des Combattants, il produit une vingtaine d’ouvrages sur des sujets très divers. La succession des tableaux qu’il publie dans son « Tu te souviens » n’a pour intérêt qu’une chute en bon mot ou un effet comique l’emporte sur la réalité historique. Genevoix, bienveillant, en dit toutefois qu’ils émanent d’un témoin. Pourtant peu de choses sont à tirer de cet ouvrage dont même la date de parution, 1958, étonne par son anachronisme. Bien entendu, la vérification des soldats allégués tués dans les récits (François Gavardin (p. 122), le sous-lieutenant Bravy et Méclier (p. 137), l’aspirant Brugias (p. 178), Malochet (p. 249), Besseix, Pagenet ou Lefermier (p. 251)) ne correspondent à aucune réalité rétablie à la consultation de Mémoire des Hommes. C’est finalement la préface de Maurice Genevoix qui apporte un intérêt à cette publication qui ne saurait atteindre le statut de témoignage.

Renseignements tirés de l’ouvrage :

Page 56 : Mailloche, surnom de la grenade à manche allemande
94 : Animaux consommés au front (rat, hérisson, moineau, couleuvres) et comment ils se cuisinent
103 : Vue du père Brottier
107 : Grenade d’or arborée sur la manche gauche, sous les brisques de front, pour membre du « Peloton de grenadiers d’élite », première appellation des Corps francs
109 : Pêche à la grenade dans la Meuse
123 : Seaux à charbon, appelés valises
126 : Tirer au renard, éviter une corvée ou une tâche
166 : Pastille bleu foncé du 1er bataillon porté aux pointes du col de la capote
207 : Inculcation forcée de l’esprit de corps
221 : Prisonniers allemands soutenant à deux mains leurs culottes aux boutons arrachés
: Frigolins

Yann Prouillet, 16 avril 2025

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