1917 au nord de l’Europe

Le cycle commémoratif étant forcément focalisé sur l’implication française dans la guerre, il est toujours bienvenu de faire un pas de côté pour regarder à nouveaux frais ce que la guerre a fait dans d’autres territoires. C’est ce que nous propose le cridien Maurice Carrez dans deux articles différents traitant de l’année 1917 dans l’Europe du nord.

À l’aube du chaos: l’année 1917 dans les pays baltes

Maurice Carrez, « À l’aube du chaos : l’année 1917 dans les pays baltes », Revue d’Allemagne et des Pays de langue allemande, n°49, juillet-décembre 2017, p. 347-

Résumé

Durant l’année 1917, les anciennes provinces baltes de l’empire tsariste connaissent d’importants bouleversements. La révolution russe entraîne dans son sillage la reconfiguration des territoires avec l’apparition d’une Estonie et d’une Lettonie autonome; elle provoque surtout la montée des forces nationalistes et des mouvements révolutionnaires (avec la création, dès l’été 1917, d’un quasi-État bolchevique dans le Vidzeme). Les forces militaires allemandes, qui occupent depuis l’été 1915 les territoires peuplés de Lituaniens et la Courlande, lancent par ailleurs, suite à l’enlisement des négociations de Brest-Litovsk, une vaste offensive à la fin décembre qui aboutit rapidement à la conquête de toutes les terres baltes jusqu’à Narva. Ludendorff croit avoir alors imposé la création du Baltikum. En réalité, il s’agit d’une victoire à la Pyrrhus qui pose les bases de futures guerres civiles infiniment plus cruelles que les affrontements politiques de l’été et de l’automne 1917.

Abstract

During the year 1917, the former Baltic provinces of the Tsarist empire were experienc- ing significant changes. The Russian Revolution brought in its wake the reorganization of territories leading to the autonomy of Estonia and unoccupied Latvia; especially, it brought about the rise of nationalist forces and revolutionary movements (with the creation from the summer of 1917 onwards of an almost independent Bolshevik state in Vidzeme). Since they didn’t tolerate the stalemate of Brest-Litovsk negotiations, the German military forces (which had been occupying Lithuania and Courland since the summer of 1915) also launched a major offensive in late December 1917 that quickly led to conquering all the Baltic lands to Narva. Ludendorff believed that in that way he has imposed the creation of Baltikum. In reality it was a Pyrrhic victory, that laid the foundations of forthcoming civil wars which turned out to be infinitely more merciless than the political confrontations of the summer and fall of 1917.

Lire en ligne : http://journals.openedition.org/allemagne/576

« Notre vie semble aller vers un avenir incertain… »1 : la frontière orientale, une obsession finlandaise (1917-1922)

Maurice Carrez, « “Notre vie semble aller vers un avenir incertain ” : la frontière orientale, une obsession finlandaise (1917-1922) », Nordiques, n°34, 2017, pp. 31-60

Résumé : l’agression soviétique de l’automne 1939 a souvent fait passer la Finlande pour une victime éternelle de la brutalité de son grand voisin. Or, la frontière orientale de ce pays a une histoire beaucoup plus complexe que ne le laisserait penser l’événement précité. En effet, la contestation des limites de l’ancien Grand-Duché a souvent été, entre 1917 et 1922, le fait des Finlandais eux-mêmes, et pas seulement d’ailleurs des ultranationalistes. Les dirigeants « rouges » de la Délégation du Peuple et ceux des gouvernements « bourgeois » qui leur ont succédé ont souvent lorgné vers la Carélie avec des projets d’annexion plus ou moins clairs. La lutte contre le bolchevisme n’a souvent été qu’un prétexte pour annexer ce que beaucoup désignaient comme un « peuple frère » dans la droite lignée du mythe kalévaléen. Les révolutionnaires russes pour leur part ont peut-être eu, ne serait-ce qu’en raison de la fragilité de leur position, des positions plus modérées. C’est ce que cet article va s’attacher à montrer en tenant compte à la fois des facteurs conjoncturels et de longue durée.

Abstract: The Soviet aggression of the autumn of 1939 has often led to think, that Finland has been an eternal victim of the brutality of its great neighbour. In fact, the eastern border of that country has experienced a much more complex history than the above-mentioned event would suggest. Indeed, between 1917 and 1922, the disputes about the boundaries of the old Grand Duchy were often intiated by the Finns themselves, and not only by the ultranationalists among them. The « red » leaders of the People’s Delegation and those of the « bourgeois » governments that succeeded them often had their eye on Karelia with clear or not plans for annexation. In most cases, the struggle against Bolshevism was only a pretext for seizing what many people referred to as a « sister nation » in connexion with the myth of the Kalevala. The Russian revolutionaries, on the other hand, took up maybe quite moderate stances, if only in order to safeguard their fragile position. The purpose of this article is to support that assertion, taking both short-term and long-term factors into account.

1 Gustav Mannerheim, Muistelmat (Souvenirs), 1ère partie, Helsinki, Otava, 1951, p. 441 : extrait d’une lettre ouverte du général et ancien régent à propos de la situation politique quelques semaines après sa défaite aux élections présidentielles, datée de septembre 1919.

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