Récit de l’excursion faite par les élèves de l’École Normale de Laon, au Chemin des Dames le 27 juin 1920

Présentation

Nous avons travaillé sur deux témoignages totalement différents retraçant l’un et l’autre une visite sur le Chemin des Dames en septembre 1919 et juin 1920.

Le premier est celui d’Yvonne Bufaumème, une jeune parisienne de 25 ans qui s’y rend en voyage organisé par le biais de la Compagnie des Chemin de Fer du Nord, le 6 septembre 1919. Cet écrit testimonial est issu d’un journal intime et relate, dans le détail, ce que nous avons nommé « une visite-marathon » d’une durée d’une journée, avec départ et retour en gare de Paris-Nord. Son analyse a fait l’objet d’une publication1.

Le second témoignage que nous présentons ici est à la fois proche temporellement et géographiquement du premier. Toutefois, des rapprochements et des dissemblances s’imposent. Ce « récit » est le compte rendu d’une excursion de jeunes élèves-instituteurs de l’École normale de Laon accomplie à la date du 27 juin 1920. Il est conservé à La Contemporaine sous la cote F/DELTA/1126/72. Il est manuscrit et comporte une dizaine de feuillets accompagnés de trois photographies et d’un plan de l’excursion3. Disons-le d’entrée, il n’a pas la qualité émotionnelle ni d’observation fine de celui d’Yvonne Bufaumène. C’est un compte rendu qui possède donc la sécheresse de ce type d’écrit, même s’il est longuement rédigé par une écriture soignée et assez serrée. Il est l’œuvre d’un des élèves- instituteurs du groupe qui a pris part à cette journée d’excursion et l’une des légendes des photographies nous indique qu’il a été rédigé par « l’élève de première année Lemaître4 ». Ces élèves- instituteurs sont accompagnés du directeur de l’École normale de Laon, « M. Fusy » et l’archiviste du département de l’Aisne, « M. Broche ». La visite était donc encadrée et séquencée par une autorité hiérarchique, avec l’intervention particulière d’un « professeur » (« M. Corriges ») muni d’une carte visant à expliquer dans le détail les combats de 1814 autour de Craonne et Hurtebise.

D’un point de vue strictement géographique, les deux témoignages se complètent car, là où Yvonne Bufaumème part de la gare de Coucy-Le-Château pour aller explorer les contrées dévastées de l’ouest du Chemin des Dames avec un retour prévu en gare de Soissons, le « récit » que nous présentons ici s’attache plus à explorer la partie orientale du même lieu. Le premier évoque une véritable sidération à la vue des dévastations, le second est plus mesuré et beaucoup moins émotionnel. Yvonne Bufaumène est une jeune parisienne qui découvre pour la première fois, cinq ans après le début du conflit, l’ampleur des dégâts dont elle a entendu parler tant par la presse5 que par les blessés qu’elle a soignés durant le conflit. Nos normaliens, dont une bonne partie doit être originaire du département de l’Aisne, ont déjà été forcément confrontés au navrant spectacle des ruines.

Mais ce qui rapproche certainement le plus ces deux témoignages, c’est la mise en scène et la scénographie imposée aux uns comme aux autres. Visiblement, le but de ces premiers pèlerinages dans ce que Rolland Dorgelès nommera en 1923 avec son RéveildesMorts,les « pays aplatis6 », a pour but de sidérer le spectateur face à l’ampleur des ravages causés par la guerre. La visite d’une touriste ou de ce groupe de normaliens est pensée, construite par les différents acteurs qui les emmènent, pour être avant tout édifiante. Le contenu de la fin du témoignage que nous présentons ici montre, à l’évidence, la volonté d’inculquer aux futurs élèves par le biais de ces jeunes enseignants, une forme de justification de l’existence du conflit par la prise en compte de visu de l’ampleur des dégâts causés par l’ennemi d’hier. Rien n’est ici neutre et toute la scénographie que nous évoquions plus haut est pensée pour être « frappante », et ce, afin de marquer les esprits à jamais par un spectacle de désolation totale. Les premiers pèlerins des champs de bataille de la Grande Guerre doivent repartir de leur périple mentalement transformés par ce qu’ils ont vu. Et ils voient beaucoup, mais que ce soit notre jeune parisienne ou nos normaliens, seuls leur regard est sollicité, voire comme c’est le cas dans ce deuxième témoignage, encadré par un discours général (et hiérarchique) sur les guerres et leurs effets7. Ni l’une ni les autres n’échangeront le moindre mot avec les « sinistrés » revenus vivre dans ces contrées absolument dévastées et presque vides de toute vie. En mesurent-ils toute la difficulté ? Rien n’est moins sûr tant le rythme de visite qui leur est imposé par les organisateurs est contraignant.

1 Jean-François Jagielski, « Un pèlerinage dans les « pays aplatis » : l’excursion d’Yvonne Bufaumène sur le Chemin des Dames » in Yves-Marie Evanno et Johan Vincent (dir.), Tourisme et Grande Guerre. Voyage(s) sur un front historique méconnu de la grande Guerre (1914-2019), Codex, 2019, pp. 269-281

2 Nos remerciements à Thierry Hardier qui nous l’a fait connaître. Nous l’avons dactylographié dans son intégralité.

3 Nous ne pouvons les reproduire ici pour des questions de droits. Deux photographies d’assez mauvaise qualité fixées au feuillet 6 représentent pour l’une trois membres du groupe près de l’épave d’un char d’assaut et pour l’autre un sentier qui gravit les pentes du plateau de Californie. Ces deux photographies sont légendées de la manière suivante : « Photo au-dessus : l’un des tanks des environs de la ferme du Temple. L’élève de 1ère année Lemaître, rédacteur du présent récit, s’y trouve par hasard appuyé de la main gauche – Ci-dessous : Craonne au Plateau de Californie ». La troisième, de meilleure qualité, est fixée au feuillet 15, représente deux véhicules et une partie des membres du groupe. Cette dernière est légendée sur ce même feuillet : « à Beaurieux ».

4 Voir note 3.

Télécharger la présentation et l’intégralité du témoignage

J.F. Jagielski

Quatre ans sous les obus, un témoignage de civile sur le front dans les Vosges

Yann Prouillet (du CRID 14-18), en collaboration avec Philippe Nivet et Jean-Claude Fombaron, vient de publier un nouveau témoignage de femme ayant vécu au plus près des combats dans les Vosges, pendant la guerre de 1914-1918. Il complète un travail entamé il y a 15 ans avec l’édition du journal de guerre d’un abbé (Une ville vosgienne sous l’occupation allemande. Journal de guerre de l’abbé André Villemin, 1914-1918, Société Philomatique Vosgienne, 2002), puis celui assez détonnant de Clémence Froment (L’écrivain de Lubine. Journal de guerre d’une femme dans les Vosges occupées (1914-1918), Edhisto, 2010) et enfin ceux de Bernadette Colin (Lusse entre les deux feux, journal de guerre de Bernadette Colin, 1914-1918, Edhisto, 2014) et d’Henri Martin (Le journal d’Henri Martin 1917. Moussey sous l’occupation allemande, Edhisto, 2014). Comme les publications précédentes, il est publié dans la maison d’édition vosgienne Edhisto et sera présenté aux Rendez-vous de l’Histoire de Blois.

Les références :

QUATRE ANS SOUS LES OBUS. Journal de guerre d’Irma Parmentelot, de Celles-sur-Plaine, 1914-1921, Texte présenté et édité par Philippe NIVET, Jean-Claude FOMBARON et Yann PROUILLET, index réalisé par Isabelle CHAVE, éditions EDHISTO, Moyenmoutiers, 2017, 375 p.

Prix unitaire : 19 € – ISBN 978-2-35515-027-2
L’ouvrage peut être commandé auprès des éditions EDHISTO
Il est également disponible auprès des points de vente partenaires (liste sur www.edhisto.eu)

Présentation du témoignage :

Quand elle commence à rédiger son journal, en août 1914, Irma Parmentelot n’a pas encore 20 ans. Fille d’un garde forestier et d’une cultivatrice, elle va relater l’expérience, rare, d’une jeune demoiselle, brodeuse, dans une petite ville ouvrière un temps envahie, puis libérée fin septembre 1914, sur le front des Vosges ; Celles-sur-Plaine.
Dans cette vallée des Vosges coupée en deux par la guerre, Irma raconte l’invasion, la proximité du front paroxystique de La Chapelotte et la menace permanente de l’obus et des gaz, dans une cité qui forme saillant dans la ligne de feu allemande qui couronne les montagnes alentour.
La Grande Guerre à Celles-sur-Plaine, « communauté sous le feu » du côté « libre » du front, est révélée par 6 cahiers composant un journal doublement intime ; celui d’une jeunesse qui découvre la guerre et les hommes qui la font, français, allemands et américains, et d’une petite ville ouvrière aux portes de la guerre. Le journal de guerre d’Irma Parmentelot est un témoignage d’autant plus rare qu’il est tenu pendant la totalité du conflit et ce jusqu’à l’été 1921 et l’inauguration du monument aux morts.

Écrire en guerre, 1914-1918, Des archives privées aux usages publics

Dans les actualités éditoriales, on peut noter la publication des actes du colloque tenu à Paris en janvier 2015 sur l’acte d’écrire pendant la guerre de 1914-1918. Cet ouvrage, sous la direction de Philippe Henwood et Paule René-Bazin, comporte en particulier la contribution de Rémy Cazals à propos de Louis Barthas (on peut d’ailleurs renvoyer à sa notice dans le Dictionnaire des témoignages).

Nombre de familles, en France et dans les différents pays ayant participé à la Grande Guerre, conservent des archives de cette période. Cent ans après, ces archives privées éveillent la curiosité émue des générations actuelles et retiennent l’attention des historiens. Ce livre s’adresse aux étudiants en histoire, aux chercheurs et, plus largement, à tous ceux qui ressentent le besoin d’en savoir plus sur les archives de ce conflit mondial qui a tant marqué notre histoire.

Plus d’informations :

Philippe Henwood et Paule René-Bazin (dir.), Écrire en guerre, 1914-1918, Des archives privées aux usages publics, Rennes, PUR, 2016, 198 p., ISBN : 978-2-7535-5199-2.

Dominique Richert sur Internet et Twitter !

Photographie de Dominique Richert qui illustre son compte Twitter

Dominique Richert est un agriculteur d’un petit village entre Alsace et Territoire de Belfort, né en 1893. À l’âge de 20 ans, il est appelé sous les drapeaux dans la première compagnie du 112e régiment d’infanterie, stationné à Mulhouse. Pendant plus de quatre ans, il est un acteur et témoin de la Grande Guerre, au sein de l’armée allemande, fréquentant de nombreux champs de bataille (Belgique, Roumanie, Russie, France). A l’issue de la guerre, il décide de coucher par écrit son expérience. Son récit, publié en 1989, que l’on compare à celui de Louis Barthas, a constitué une source précieuse pour Frédéric Rousseau dans le cadre de son travail sur l’expérience combattante (La Guerre censurée. Une histoire des combattants européens de 14-18, Paris, Seuil, 1999). Une notice est également consacrée à son témoignage dans le dictionnaire des témoignages.

Or, voilà qu’il y a peu, Dominique Richert connaît une seconde vie sur la toile. Un site (http://www.1418-survivre.net), riche en informations et à la présentation agréable, permet de consulter les manuscrits, des documents en lien avec les diverses éditions du récit, des vidéos qui donnent un éclairage particulier au témoignage. Il offre aussi la possibilité de commander un exemplaire des Cahiers d’un survivant. On peut également suivre l’actualité de ce Dominique Richert 2.0 en s’abonnant à son compte Twitter : @dominik_richert. Très belle initiative qui permet de découvrir et redécouvrir ce témoignage.

Colloque international : En guerre avec les mots

L’Université de Gênes organise, avec la participation du CRID 14-18 et de plusieurs de ses membres, les 25-28 novembre 2015 un colloque portant sur les lettres, journaux et mémoires de soldats, de femmes et d’enfants durant le premier conflit mondial.

Il se tiendra au Palazzo Ducale, Salone del Minor Consiglio, Piazza Giacomo Matteotti, 9, 16123 Gênes.

En voici une présentation :

Quels sont les sentiments, les perceptions et les attitudes mentales des soldats, mais aussi des civils, des femmes, des enfants, durant la guerre ? Quelles sont leurs stratégies de résistance psychologique à cette déstabilisante expérience ? On peut tenter de répondre à ces questions en se tournant vers l’ample typologie de textes produits par les combattants et la population civile “mobilisée” : lettres, journaux et mémoires qui – encore en partie enfouis dans des tiroirs de famille ou conservés dans des archives d’écriture populaire – expriment des potentialités narratives considérables, mais revêtent aussi d’une part, un fort intérêt historiographique et linguistique. D’un côté, en effet, ils agissent efficacement comme sonde de profondeur et conduisent directement à l’intérieur de l’événement que constitue la guerre, de l’autre, ces textes dressent un instantané de l’état de la langue au début du XXe siècle en Europe. Ce colloque a pour but de se confronter aux questions méthodologiques encore ouvertes, présentant des textes particulièrement significatifs et des résultats de recherche dans ce domaine en croisant les approches scientifiques sur les écrits des soldats des divers fronts en Europe durant le conflit.

Le programme : 25 novembre

Cliquer sur l’image pour télécharger le programme

8.30  Ouverture officielle

  • Luca Borzani, Président de Genova Palazzo Ducale Fondation pour la culture
  • Olivier Brochet, Consul général de France à Milan
  • Francesca Imperiale, Surintendant des archives pour la Ligurie/ Archives d’État de Gênes

9.00-9.30 Conférence inaugurale de Antonio Gibelli (Archivio Ligure della Scrittura Popolare de Genova)

Il diario di guerra dei semicolti: un fiume carsico tornato alla luce

LE LABORATOIRE DE L’ÉCRITURE

Ière session

9.30 : Introduction, Quinto Antonelli (Fondazione Museo Storico del Trentino-Archivio della Scrittura Popolare de Trento)

Le scritture popolari italiane della guerra: il fenomeno, gli archivi, le ricerche

10.00 : Sybille Grosse, Lena Sowada, Université de Heidelberg

Les ego-documents de la Grande Guerre et l’analyse du discours historique : des questions méthodologiques

10.20 : Corinne Gomila, Université de Montpellier

Sur les traces de l’autocensure

10.40 : Teresa Bertilotti, Université de Milan-Bicocca

«Gentili incognite, sconosciuto soldato». Scritture dal fronte e sul palcoscenico

11.10 : Sylvie Housiel, Université de Tel-Aviv

Émotions et perceptions à l’épreuve de la censure et de l’autocensure: les poilus de 1915

11.30 : Chantal Wionet, Beatrice Dal Bo, Université d’Avignon

Correspondances intimes de femmes peu-lettrées pendant la Grande Guerre

IIe session

14.00 Introduction, Agnès Steuckardt (Université Paul Valéry – Montpellier 3)

L’avenir, dans les lettres des Poilus ordinaires

14.30 : France Martineau, Université d’Ottawa

Derrière les lignes : correspondances canadiennes de guerre

14.50 : Gérald Sawicki, Université de Lorraine

Ce que révèlent les mots : l’exploitation des lettres et carnets de notes des soldats allemands par les services de renseignement français (1914-1918)

15.10 : Loredana Trovato, Université d’Enna

Des Poilus et des Boches au miroir, ou de la représentation dans les journaux de tranchées

16.10 : Stefano Vicari, Université de Gênes

“Et alors c’est la vision, si vive qu’elle semble réelle, de vous tous dans les lieux que j’aime tant…” ou comment l’écriture permet aux poilus de s’enfuir de la réalité contingente

16.30 : Sonia Branca-Rosoff, Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3

Discours autre et activité métadiscursive dans les lettres des peu-lettrés pendant la guerre de 1914-1918

17.30 Thierry Vissol, économiste et historien

Présentation du volume Toby, dalla pace alla guerra 1913-1918, Donzelli, 2014

Interviendra avec l’auteur Nancy Murzilli (Université de Gênes/Institut français Italia)

26 novembre AU CŒUR DE LA GUERRE

Ière session

9.00 : Introduction, John Horne (Trinity College de Dublin)

Publique ou privée ? La correspondance intime pendant la Grande Guerre

9.30 : Jean-Paul Pellegrinetti, Université de Nice

Patriotisme et insularité au miroir de la correspondance des Corses durant la Grande Guerre

9.50 : Simone Attilio Bellezza, Université de Trente

La scrittura come riflessione identitaria: diari e memoriali dei trentini prigionieri in Russia

10.10 : Jacopo Lorenzini, Université de Sienne

F-11, o della memoria obbligata. Gli ufficiali italiani di ritorno dalla prigionia e le loro testimonianze scritte di fronte alla Commissione Interrogatrice dei Prigionieri Rimpatriati.

10.40 : Arabella Hobbs, Université de Pennsylvanie

Shedding words not blood: Jacques Rivière’s Carnets de Captivité and the politics of heroism

11.00 : Francesco Frizzera, Université de Trente

Diari e memorie dei profughi trentini durante la Grande Guerra. Specchio del travaglio identitario di una popolazione costretta a riconsiderare il proprio paradigma di appartenenza

11.20 : Marie-Chantal Lhote-Birot, Université de Lorraine

Auguste Vonderheyden, l’écriture diaristique

IIe session

14.30 : Introduction: Gustavo Corni (Université de Trente)

Voci dalle terre invase. Friuli e Veneto orientale 1917/1918

15.00 : Graziano Mamone, Université de Gênes

Servizio postale e scrittura. Istituzioni, rappresentazioni, immagini

15.20 : Michel Paoli, Université de Picardie

Italophones de l’armée austro-hongroise sur le front russe: les tribulations d’un soldat entre écriture intime et reconstitution historique

15.40 : Alvio Patierno, Université Suor Orsola Benincasa de Naples

Survivre, entre humorisme et satire, dans le Journal de guerre illustré d’Eugène Birsinger, paysan du Sud-Alsace

16.10 : Antonio Petrossi, Université de Naples

Le forme di propaganda nei giornali per l’infanzia durante la Grande Guerra

17.30 : Antonio Gibelli (Archivio Ligure della Scrittura Popolare de Gênes)

Présentation du volume La guerra grande. Storie di gente comune, Laterza, 2014

Interviendront avec l’auteur : Claudio Bertieri et Luigi Giachino. Projection du film La Guerra e il sogno di Momi réalisé et produit par Segundo de Chomòn en 1917.

27 Novembre

Ière session

9.00 : Introduction Fabio Caffarena (Université de Gênes)

Sopra la guerra: testimonianze di aviatori oltre il mito

9.30 : Pierre Allorant, Université d’Orléans

Pont aérien: la Grande Guerre à tire d’ailes jusqu’à elles

9.50 : Andrea Zaffonato, Université de Padoue-Venise-Vérone

Il volto della Patria nei paesaggi di guerra

10.10 : Anna Grillini, Université de Trente

La guerra mentale. Scritture dal manicomi

10.30 : Giovanni Cavagnini, Scuola Normale Superiore de Pise

Parole di fede: voci di chierici dagli archivi del cardinale Pietro Maffi

11.00 : Chantal Dhennin-Lalart, Université de Lille 3

Au cœur de la Grande Guerre: le journal d’une religieuse destiné à sa supérieure

11.20 : Carlo Stiaccini, Université de Gênes

Parole al cielo. Le scritture di guerra inviate agli uffici notizie delle parrocchie e delle diocesi italiane

11.40 : Paola Valenti, Université de Gênes

«Grida d’allarme di un pittore»: la Grande Guerra nella prosa di Ludwig Meidner

IIe session

14.30 : Introduction, Rémy Cazals, Université de Toulouse

La place des femmes dans 500 Témoins de la Grande Guerre

15.00 : Augusta Molinari, Université de Gênes

La scrittura come pratica di assistenza. Un aspetto della mobilitazione femminile in Italia nella Grande Guerra

15.20 : Patrizia Gabrielli, Université de Sienne

La guerra vicina, la guerra lontana. Memorie di donne.

15.40 : Giuliana Franchini, Université de Gênes

La rappresentazione dei lutti di guerra nel Diario delle volontarie dell’Ufficio Notizie di Milano (1915-1919)

16.10 : Christa Hämmerle, Université de Vienne

However, I want the war to be at an end already.” War criticism and the longing for peace in diaries and letters of Austrian women and young girls (1914-1918)

16.30 : Alessia Vezzoni, Université de Sienne

In nomine Matris. Documento e «compromissorietà» nel carteggio bellico di Carlo Emilio Gadda con la madre (1915-1919)

16.50 : Anastasios Zografos, Université Paul Valéry – Montpellier 3

L’amour «occupe» les tranchées sur le front de l’Orient : la correspondance entre les soldats grecs et les marraines de guerre

18.30 : Castello D’Albertis, Musée des Cultures du monde de la Mairie de Gênes)

Présentation, avec projection d’images, du catalogue La collezione di cartoline della Grande Guerra nel Museo Francesco Baracca di Lugo, de Serena Sandri et Patrizia Tamassia avec la collaboration de Daniele Serafini, BUP, 2015. Intervenants : Daniele Serafini, Irene Guerrini et Marco Pluviano

19.00 : Présentation et projection : La I Guerra Mondiale attraverso le immagini inedite dell’Archivio Fotografico del Cap. E.A. D’Albertis

19.15-19.45 : Visite guidée de la demeure du Capitaine D’Albertis

28 novembre

APRÈS LA GUERRE

09.00 : Introduction, Manon Pignot (Université de Picardie)

La guerre après la guerre : les mémoires juvéniles du conflit

9.30 : Ugo Pavan Dalla Torre, Université de Turin

Rielaborare pubblicamente (e collettivamente) l’esperienza di guerra. L’Associazione Nazionale fra Mutilati ed Invalidi di Guerra e la scrittura della memoria della Grande Guerra (1915-1923)

9.50 : Nicola Maranesi, Archivio Diaristico Nazionale de Pieve Santo Stefano

La Grande Guerra. I diari raccontano. Un progetto editoriale in collaborazione tra Archivio diaristico nazionale di Pieve Santo Stefano e Gruppo l’Espresso

10.10 : Patricia Kottelat, Université de Turin

Les JMO, source méconnue de l’édification mémorielle de la Grande Guerre. Parcours diachronique 1918-2014

10.40 : Matthieu Quignard, CNRS de Lyon

«Ma Guerre 1914-1918», de Charles Bruneau. Les mots d’un linguiste sur le front

11.00 : Anna Tylusińska-Kowalska, Université de Varsovie

Ricordi della Grande Guerra di Michał Lityński, un legionario italofilo

11.20 : Piotr Podemski, Université de Varsovie

Un D’Annunzio italo-americano in guerra: mito bellico e success story nell’autobiografia di Fiorello La Guardia

11.40 : Débat

12.10 : Clôture du colloque

Le colloque a été organisé avec le patronage et le soutien de :

Università di Genova ; Dipartimento di Antichità, Filosofia, Storia (DAFIST) et Dipartimento di Lingue e Culture Moderne (LCM) – Università di Genova ; Institut français Italia (IFI) ; Fondazione Museo Storico del Trentino-Archivio della Scrittura Popolare di Trento ; Genova Palazzo Ducale-Fondazione per la cultura ; Institut Universitaire de France ; Castello D’Albertis. Museo delle Culture del Mondo del Comune di Genova ; École française de Rome ; Corpus 14 (Praxiling – Université Paul-Valéry Montpellier, CNRS) ; Laboratoire Framespa-Université de Toulouse 2; Soprintendenza Archivistica per la Liguria/Archivio di Stato di Genova ; Università di Trento ; Alliance Française de Gênes.

Et avec le patronage de :

Archivio Ligure della Scrittura Popolare (ALSP) – Università di Genova ; Centre de Recherche de l’Historial de la Grande Guerre ; Collectif de recherche international et de débat sur la guerre de 1914-1918 (CRID 14-18) ; Conservatorio di Musica Niccolò Paganini di Genova ; Dipartimento di Scienze della Formazione (DISFOR) – Università di Genova ; Museo “Francesco Baracca” di Lugo; Università Italo-francese (UIF-UFI); Ufficio Storico Aeronautica Militare.

Parution: témoignage d’Albert Marquand, postface d’André Bach

Et le temps, à nous, nous est compté. Lettres de guerre d’Albert Marquand, 1914-1919, C’est-à-dire éditions, 2010, en souscription jusqu’au 15 janvier 2011 à 22 € + 4 € de port.

Présentation par André Bach:

Parmi les nombreux facteurs socio-culturels ayant une influence sur le comportement des combattants, un des plus clivants est celui constitué par l’âge. L’armée française  a mobilisé les hommes valides de 20 à 45 ans : recrues en cours de service, réservistes, territoriaux et réserve de l’armée territoriale. On ne voit pas  la vie et la guerre qui se déroule de la même manière à 20 ans, 30 ou 40. Albert Marquand est un de ces jeunes hommes de la classe 1915 qui, à l’effectif  de 279 000, a été incorporée en décembre 1914 et a laissé sur le champ de bataille 77 000 de ses membres, soit le deuxième taux le plus fort après celui de la classe 1914.

Cette génération est entré dans la guerre, mineure légalement, sous forte dépendance affective parentale et en est sorti, adulte, émancipée. Elle a profondément évolué à partir des expériences accumulées et sous l’influence de toutes sortes de facteurs qui  se sont trouvés plus ou moins prépondérants au gré des circonstances , si imprévisibles dans le chaos de la guerre.

Albert Marquand, bien doué physiquement et intellectuellement, nous donne un exemple de parcours évolutif au sein du conflit. Curieux de voir la guerre et de s’y bien comporter, prêt, pour faire plaisir à ses parents à gagner du galon  pour leur faire honneur, il marche au feu avec détermination, comme il l’indique à son père à la veille de rejoindre les tranchées : « « Tu peux être sûr qu’en toutes circonstances ton fils fera son devoir ».Nommé sous-officier et décoré de la croix de guerre sur le terrain, il ne s’est néanmoins jamais remis de son premier combat dans l’Argonne, où son unité a été submergée par l’ennemi en juillet 1915. Dès lors, il accomplira son devoir tout en cherchant toutes les occasions légales où à la limite de la légalité pour esquiver les aléa de la confrontation armée. C’est ainsi que ce sous-officier, bien noté et apprécié de ses chefs, ses pairs et ses subordonnés, va en 1918 décider l’abandon de son grade et retourner 2° classe pour devenir opérateur TSF en prévenant ses parents qu’il tient là sa chance de survie à la guerre. Choqué par les cris de victoire entendus à l’arrière le 11 novembre 1918, il écrit à ses parents le 12, sur un ton un tantinet agressif : « En ce qui me concerne, je considère une chose : c’est que je suis arrivé à traverser la tourmente, les membres à peu près intacts. C’est une affaire pour moi, savez-vous ! »

Ce témoignage constitué de la retranscription des lettres d’Albert Marquand à ses parents et à ses jeunes frères, de son carnet de route tenu sur une courte période et d’un impressionnant compte-rendu de qu’il a vu, fait et ressenti pendant la bataille de la Malmaison d’octobre 1917, est une invite à cesser de surinterpréter avec nos yeux d’aujourd’hui le comportement d’alors et de sortir du faux dilemme mono-descriptif : des soldats soit consentants soit contraints. La réalité comme le montre la lecture de ce passionnant témoignage ne se laisse pas aussi facilement être érigée en théorie. L’historien doit se montrer bien plus humble dans son approche de la mentalité des combattants.

Antoine Prost dans un récent commentaire sur le livre d’André Loez, 14-18. Les refus de guerre. Une histoire des mutins, pose bien ce problème : « il est assez vain “de chercher dans les consciences des ‘raisons’ de tenir et de combattre, dans la mesure où aucun autre choix n’est disponible” (37). Il y a la guerre, un événement qui s’impose à tous, une évidence collective à laquelle les individus s’adaptent. Ils n’ont pas le choix. Ce “fait national” est “de part en part un fait social, irréductible à la psychologie et à la culture ou au patriotisme des seuls individus” (43)[1]. »

Il est dommage que ce livre ne soit pas prêt pour la mi-novembre car il aurait pu servir d’introduction démonstrative au colloque international que le CRID organise dans l’Aisne les 12 et 13 novembre  2010 : les identités nationales au prisme des identités sociales »

En bref, vous l’aurez compris, l’auteur de ces lignes, qui a postfacé à cet ouvrage , eu égard à son intérêt, conseille fortement l’acquisition et la lecture sans modération de ce livre encore en souscription, qui fait progresser dans la réflexion de la question lancinante : «  Mais comment ont-ils tenus ? »


[1]. « Compte rendu de André Loez, 14-18. Les refus de la guerre. Une histoire des mutins, 2010 », Le Mouvement Social, et en ligne : http://mouvement-social.univ-paris1.fr/document.php?id=1642. Les citations en italique sont tirées du livre d’André Loez, le reste constitue le commentaire du professeur Antoine Prost.

Parution : Carnets de guerre d’un hussard de la République (Marc Delfaud)

Septembre 1914. « À celui qui trouvera le présent carnet, prière de le faire parvenir à Mme Delfaud, institutrice à La Barde par Saint-Aigulin, Charente-Inférieure. » Cette sobre phrase inscrite en tête du premier des 18 carnets de guerre de Marc Delfaud nous avertit : ce jeune marié, instituteur dans le civil, parti à la guerre sans même avoir pu embrasser sa femme, tient à lui laisser une trace de son passage dans cette machine à broyer les hommes. C’est pour elle, avant tout, qu’il tient son journal. Tel le miroir que Stendhal promenait au bord du chemin, son témoignage est toujours minutieux, spontané mais documenté. Et Marc Delfaud est un observateur digne de confiance : pacifiste, il est aussi un
patriote que l’on ne peut soupçonner d’aucun secret défaitisme. S’il a tenu à partager les misères de la piétaille des tranchées alors que son niveau d’études lui aurait permis de prendre du galon, ses opinions progressistes ne l’aveuglent en rien. Il n’y a nul sectarisme chez cet observateur lucide, qui sait que le peuple n’est pas exempt de tares et de vices, au front comme ailleurs. Delfaud, affecté au peloton des téléphonistes, est en permanence au contact du commandement, dont il observe la conduite sans complaisance. Il rend hommage à la valeur et l’humanité de nombreux officiers, mais il est révolté par l’arrogance de certains gradés et les brimades stupides infligées à des hommes qui ont les plus grandes chances de finir déchiquetés par les obus. On n’oubliera pas de sitôt ces portraits au vitriol : le colonel qui force les hommes à passer dans les mares de boue sous prétexte qu’ils sont déjà sales, cet autre qui lève sa cravache sur le soldat qui ne se dérange pas assez vite. Cet autre encore qui expédie chez lui, par malles entières, le butin pillé dans les villages évacués…
Marc Delfaud vérifie ses informations et les recoupe. Et quand elles ne sont pas de première main, il cite ses sources. Témoin intelligent, il sait lire entre les lignes les ordres et les bulletins, et en tire souvent des conclusions exactes. Le front, il le montre bien, est aussi le reflet d’un monde en pleine évolution. Face aux sous-officiers et officiers de carrière, encore empreints de routine bureaucratique et de préjugés de classe, les mobilisés sont désormais des citoyens, formés par l’école publique de la IIIe République ; ils veulent bien accepter de sacrifier leurs vies, mais non d’être insultés, combattre, mais non crever comme des cloportes dans des trous fangeux et puants.
Il ne faudrait cependant pas croire que Marc Delfaud n’est qu’un observateur froid à force d’être lucide. S’il absorbe toutes les informations, son œil demeure sensible à ce qui reste de beauté dans cet univers de feu et de folie : le ciel et ses nouveaux oiseaux de métal, dont on peut oublier, quand on les voit de loin, qu’ils sont aussi des moyens de destruction ; les bribes de paysage, les objets miraculés, l’indestructible aptitude de l’homme à créer la beauté jusqu’en
enfer. En témoigne sa rencontre avec ce curieux musicien, en mars 1915, qui « sort de son sac un archet fait avec un morceau de bois et des crins de cheval, et un violon dont une boîte à cigares et un manche à balai ont fait tous les frais », et qui en tire des sonorités insoupçonnées qui font oublier aux Poilus, l’espace d’un instant, la guerre et la mort qui rôde.
Frappé par la finesse et la qualité littéraire du récit de Marc Delfaud, le général André Bach, ancien chef du Service historique de l’Armée de terre qui, depuis plus de dix ans, réfléchit sur le premier conflit mondial à partir des archives militaires et de son expérience d’officier, voit en ce livre l’un des très rares documents mis au jour récemment qui soit capable de changer notre vision de
la Grande Guerre, Les notes et l’apparat critique très complets qu’il a rédigés pour cette première édition en font bien davantage qu’un témoignage : une source historique à part entière.

(Présentation de l’éditeur)

Marc Delfaud, Carnets de guerre d’un hussard noir de la République, éditions italiques, 2009. Ouvrage édité par André Bach et préfacé par Antoine Prost.

Parution: témoignage de Jérôme Castan

Un « col blanc » dans la guerre.

« Carnets de guerre 14-18 », Revue de l’Agenais, n°1, 2008, pp. 57-94.

Lafon Alexandre, « Témoignage de guerre d’un « col blanc », Jérôme Castan (1914 – 1918), Revue de l’Agenais, n°1, 2008, pp. 95-112.

Jean Norton Cru notait dans Témoins en 1929 le peu de témoignages qu’il avait pu étudier de combattants non bacheliers. A regarder les nombreux récits de combattants publiés depuis, peu de témoin appartiennent à la catégorie des « cols blancs » : employés de bureau, de banques, liés à l’essor du travail salarié et des services dans la société française. La Revue de l’Agenais publie ce mois-ci un tel témoignage, le carnet de Jérôme Castan, âgé de 21 ans au début de la guerre, employé à la Société générale à Agen, mobilisé en octobre 1915, ayant combattu sur le front de l’ouest mais aussi en Italie à partir de novembre 1917. Un carnet riche d’informations et de notations rédigés au cœur de l’expérience militaire (incorporation) et combattante.

Une pièce de plus à verser dans le dossier d’une histoire sociale de la Grande Guerre.