Kuentz, Charles (1897-2005)

Jean-Noël Grandhomme. Ultimes sentinelles. Paroles des derniers survivants de la Grande Guerre. La Nuée Bleue, 2006, 223 p.

Résumé de l’ouvrage :
Jean-Noël Grandhomme, historien et universitaire, a interviewé, de 1995 à 1999, 17 des derniers témoins du Grand Est (Vosges, Moselle, Bas-Rhin, Jura, Aube, Haut-Rhin, Meurthe-et-Moselle, Suisse et Ardennes). Des histoires d’hommes jeunes, tous nés dans la dernière décennie du XIXe siècle (de 1893 à 1899), jetés dans le conflit et qui se souviennent de leur parcours dans la Grande Guerre, à l’issue de laquelle ils ont miraculeusement survécu, et qui fut pour eux le plus souvent une aventure extraordinaire. L’auteur, spécialiste de la période, a opportunément résumé les entretiens et certainement gommé les erreurs cognitives, les confusions ou les anachronismes attachés à ces entretiens, réalisant un exercice dont il conclut que « l’enquête orale est d’ailleurs devenue une science auxiliaire de l’histoire à part entière depuis une vingtaine années », correspondant à l’ère des ultimes témoins. Il dit : « Avec ces derniers témoins, ce n’est pas seulement la mémoire de la Grande Guerre qui s’en va, mais aussi cette d’une société rurale, mêlée de rudesse et de solidarité. » Par son questionnement en filigrane ; « Quel regard ces anciens soldats, dressés les uns contre les autres par l’Histoire, portent-ils sur cette gigantesque conflagration ? Qu’en ont-ils retenu, et oublié ? Surtout, qu’avaient-ils à nous dire, à nous, Français et Européens du XXIe siècle, juste avant de disparaître ? » érigent cette œuvre mémorielle et testimoniale en véritable livre hommage. Plus profondément, chacun des témoins, servant dans les deux armées belligérantes, témoignent de leur implication soit dans l’armée française, soit en tant qu’alsaciens ou lorrains dans l’armée allemande, avec les particularismes ou des traitements différenciés attachés cette origine : engagement dans la marine, envoi systématique sur le front de l’est, distinction dans le commandement ou le statut de prisonnier, etc. Le chapitre consacré à Charles Kuentz concerne les pages 195 à 201 de l’ouvrage.

Eléments biographiques :
Charles Kuentz est né à Ranspach (Haut-Rhin) le 18 février 1897. Il est fils de chef de gare et déménage donc plusieurs fois en Alsace et en Lorraine dans son enfance. Il perd sa mère à l’âge de 12 ans et fait ses études à Montigny-lès-Metz, son père ayant été muté à Boulay (Moselle). C’est là que la guerre le mobilise. Après avoir fait ses classes au camp de Kuterbog, près de Berlin, Il est incorporé dans l’artillerie allemande en 1916 et est affecté en Russie, sur le front devant Baranovitchi, mornes plaines russes… Comme Louis Evrard, il est téléphoniste et chargé, tâche périlleuse, de réparer les fils téléphoniques quoiqu’il arrive. Il arrive sur le front ouest et connait la guerre de positions en Artois et en Flandre en mars et avril 1917. Après une carrière de postier, il meurt à Colmar le 7 avril 2005 à l’âge de 108 ans.

Yann Prouillet, 28 juin 2025

Share